Conception d’un générateur triphasé 1
Introduction
Depuis un moment je voulais faire un générateur triphasé, pour voir ce que ça donnerait en comparaison avec un générateur du commerce. Faire son propre générateur, au-delà du délire de la conception en elle-même peut être intéressant pour s’adapter à des besoins spécifiques (taille, forme, puissance), ou encore de faire des économies (cela reste totalement à prouver) vu le prix des gros générateurs.
Autre chose intéressante, un générateur triphasé peut aussi être transformé en moteur BLDC.
Ma première idée est d’utiliser des relais comme éléments de bobinages pour mon stator. En effet, concevoir le stator d’un générateur est la partie la plus complexe à mettre en place si on veut faire cela correctement.
Comme j’avais beaucoup de relais sous la main, et qu’ils ont beaucoup de spires, ils devaient théoriquement induire un fort voltage. De plus ils ont aussi un coeur de métal, ce qui optimise encore plus leur efficacité.
Conception du stator
Après quelques tests en faisant bouger un aimant au-dessus d’un morceau de relais, j’ai mesuré un voltage plutôt élevé, ce qui semble être bon signe. L’idée étant maintenant de pouvoir faire varier très rapidement un champ magnétique le plus proche possible du bobinage, il faut concevoir la structure du générateur.
Je vais partir sur un système à 6 bobines et 8 aimants (règles de 3 bobines pour 4 aimants), et laisser 6 slots supplémentaires pour faire éventuellement un système a 12 bobines si le générateur est concluant (mais je n’ai pas assez de relais pour le moment).

Prototype avec la partie basse du stator
Conception du rotor
Le stator est très simple, il faut 8 aimants et alterner leur champ magnétique orienté vers les bobines (soit l’extérieur), donc N-S-N-S-N-S-N-S (N=Nord, S=Sud).

Je possède des aimants ronds de 10mm de diamètre, mon rotor ressemble donc une fois finalisé à ça:

J’ai fait en sorte que l’on puisse facilement changer la partie avec les aimants sans avoir a tout réimprimer.
Une fois le rotor assemblé, puis mis en rotation, on a un voltage très encourageant de 4V (pour une vitesse de rotation relativement basse étant donné que je fais ça a la main directement sur l’axe).
Cablage
Le câblage est en étoile. Il faut bien faire attention à la polarité des bobines pour que leur courant ne s’annule pas si opposé.

Il suffit de faire des mesures petit à petit pour être sur que tout fonctionne bien.

Finalisation
Une fois que le cablâge est bien fait, on crée la partie supérieure, on soude et on visse pour avoir le générateur finalisé.

Un petit générateur chinois a 3€ en comparaison.
Mesures
Le générateur tourne bien, tout est bien assemblé et il est capable d’allumer une LED quand on le fait tourner assez vite. On a une sortie de 28VPP (peak to peak, soit 14V -14V) sur 3 phases avec une rotation manuelle, ce qui semble très bien.
Cependant, un test pour évaluer la puissance magnétique du générateur commence mal. Il s’agit de relier les trois fils de sorties (les phases), faire tourner le rotor et de faire la différence entre “à vide” (aucun fil relié) et avec une charge (tous les fils reliés). En théorie, il devrait être beaucoup plus difficile de faire tourner le rotor avec une charge. Dans le cas présent cela ne change que très peu la rotation, ce qui est signe d’un générateur très faible.
En continuant les tests, il s’avère qu’une fois le courant redressé en courant continu (en passant par des ponts de diodes), on passe de 14V alternatif à … 7V continu. Une chute de tension étrange étant donné qu’on devrait se retrouver avec un voltage proche de 14V en sortie.
Problèmes
Il s’avère que le problème est très simple. Les relais étant constitués d’un fil très fin (0.1mm) et très long, ils ont une très grande résistance. Chaque relais a une résistance de 70 ohms, une fois le câblage en étoile fait, on se retrouve avec 280 ohms par phase, ce qui est beaucoup… trop.
Je pensais qu’une grande résistance risquerait tout au plus de faire chauffer les bobines quand les RPM (rotations par minute) seraient élevés, mais il s’avère que cette même résistance diminue énormément le courant de sorti. On a donc une intensité extrêmement faible et capable uniquement d’allumer une LED rouge, soit dans les 20mA…
Cela concorde d’ailleurs avec la loi d’Ohm que tout le monde devrait connaître: U = R⋅I
Si on considère une tension de 14V et une résistance de 280 ohms, on ne peut pas espérer avoir un courant de plus de 50mA. Ce même courant qui va en grande partie être dissipé par les bobinages du générateur.
Calculs
Après quelques recherches sur internet, voici les calculs permettant d’obtenir une valeur théorique de la puissance d’un générateur à partir du Vpp mesuré, et de la résistance des phases.
Vrms = Vpp / (2⋅√2)
Vrms = 0.3535 * Vpp
Power = V² / R
Pour mesurer la puissance max, on ajoute une résistance équivalente à celle de la phase, ce qui donne:
PowerMax = 1/2 ⋅ V² / (R + R)
PowerMax3phase = 3⋅PowerMax
Dans le cas de ce générateur on a donc, pour 8Vrms (rotation lente):
PowerMax = 1/2 ⋅ 8² / (278⋅2) = 0.057 Watts
PowerMax3phase = 0.17W
Exemple avec le générateur chinois pour 6Vrms (rotation lente):
PowerMax = 1/2 ⋅ 6² / (39⋅2) = 0.23 Watts
PowerMax3phase = 0.69W
Conclusion
On se retrouve avec un beau générateur… certes, mais extrêmement peu efficace. Pour comparaison, le générateur chinois à 3€ est meilleur d’au moins un facteur 4! En plus d’être moins cher… On ne s’embêtera donc pas à aller plus loin en faisant un système d’accélération de la rotation à base de rouages.
Les prochains essais se feront donc avec un fil de bien plus importante section, afin d’espérer de meilleurs résultats. La suite au prochain épisode…